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14 Oct

La Rencontre de Jésus (Texte inspiré de ma présentation orale lors de la cérémonie de mes vœux définitifs le 14 octobre 2012)

Publié par j-f

Tout d’abord je tiens à remercier le père général et le père provincial pour l’opportunité qu’ils me donnent de pouvoir prendre la parole devant vous. Merci à vous tous d’être là en ce jour si important pour moi! J’aimerais vous parler de la Rencontre de Jésus sous la forme d’un témoignage-partage. Puisque je désire faire bref (après presque deux heures de cérémonie il est normal que nous soyons un peu fatigués) je vais me limiter à une période de ma vie comprise entre, environ, les âges de douze et vingt-trois ans.

Isaac Newton

À l’adolescence mon parcours a été influencé par l’étude des sciences, surtout la physique, et par celui qu’on appelle le père de la mécanique classique, Isaac Newton (1643 – 1727). Je crois avoir admiré chez ce physicien mathématicien britannique le sens de l’observation des diverses réalités du monde matériel : les forces naturelles, la masse des corps, leurs mouvements, etc. Surtout, je crois avoir admiré comment il a pu mettre en relation ces diverses réalités et, ainsi, comment il a pu mettre du sens dans l’univers matériel. Sa célèbre formule F= m x a (la force = la masse x l’accélération) a été, tout au long de mes années d’études (du 4e secondaire à l’université), un objet d’étonnement et d’admiration. Tellement de problèmes mécaniques complexes peuvent se résoudre à partir de cette unique formule! Et puis, comble d’étonnement, il a pu généraliser sa théorie aux mouvements des planètes de notre système solaire! Ce qui m’amène à croire que ce physicien (et que la physique classique en général) a eu autant d’influence sur moi, c’est cet acharnement que j’ai eu à chercher du sens là où je n’en éprouvais aucun, là où tout me semblait relever du pur arbitraire et de l’irrationnel, c’est-à dire, le monde intérieur, celui des sentiments, des affections, des émotions, etc. De même, là où les grandes questions existentielles s’entrechoquent : Qui suis-je? D’où je viens? Pourquoi la mort? La souffrance? Le mal? Quelque part je me suis sûrement dit : S’il y a du sens dans l’univers matériel, il faut qu’il y en ait aussi dans l’ « univers immatériel »!

Les romans

À la même époque, j’avais aussi développé une passion (bien qu’inconsciemment) pour la lecture de romans (et dans une moindre mesure de pièces de théâtre). Les univers fictifs des Daudet, de Balzac, L. Hémond, Félix-Antoine Savard, Anne Hébert et bien d’autres, devenaient pour moi, à chaque lecture, une aventure exaltante où je pouvais m’identifier tantôt à un personnage, tantôt à un autre, dépendamment de ce qu’ils vivaient et qui correspondaient à ce que moi je vivais. C’est ainsi que les romans me sont devenus des « amis fidèles » en lesquels je pouvais me confier! À l’école secondaire le professeur nous avait demandé de faire un résumé d’un roman, que nous avions à choisir parmi quelques suggestions. C’est de cette façon que mon premier roman m’a fait regretter les bandes dessinées de mon enfance! Il fallait maintenant tout imaginer dans sa tête, retenir par cœur les noms de tous les personnages, quel effort! Après avoir passé à travers cette petite brique de quelques centaines de pages aux petits caractères, je me disais certainement que je n’étais pas fait pour les lettres! Pourtant, à mon insu je crois, l’humanité des personnages m’avait touché. Pensant aux situations dramatiques qu’ils vivaient, je me disais qu’il fallait qu’il y ait un sens à tout cela et je cherchais pour eux (et pour moi!) une « porte de sortie ». Ce premier roman était l’Eugénie Grandet d’Honoré de Balzac.

Avril 1984

Un jour, je me retrouve devant la bibliothèque de la maison avec l’idée de trouver un nouveau roman, pour relancer ma recherche de sens. Cependant, je sens l’angoisse du vide m’envahir au fur et à mesure que je scrute les rayons. En effet, j’avais lu tous les livres qui se présentaient devant moi. Tout à coup, un petit livre retient mon attention! Il surgissait discrètement sur un rayon du bas. En le prenant, je me suis demandé comment il se faisait que je ne l’avais jamais lu. D’ailleurs, je savais qu’il était là depuis longtemps, qu’on me l’avait remis à la petite école au cours de catéchèse. Rendu là, j’aurais encore pu me dire que ce livre n’était pas fait pour moi. Peut-être, était-ce le fait d’avoir lu l’Apologie de Socrate (par Platon) qui m’a convaincu de ne pas le rejeter? Le titre de ce livre était Les quatre Évangiles. Dès les premiers paragraphes de cette lecture il était évident qu’il se passait quelque chose en moi. Je voyais, graduellement, apparaître au regard de mon âme, une réponse au questionnement existentiel qui m’habitait depuis plusieurs années, réponse qui se faisait jour sous la forme d’un Salut donné gratuitement. Non pas un « comment » ni un « pourquoi » aux grandes questions évoquées plus haut, mais une porte de sortie ouverte afin d’échapper à l’emprise du non-sens. Cette porte c’était Jésus-Christ (Jn 10, 7-9). Il me suffisait, pour prendre cette porte, d’un simple oui (Lc 1, 38) à l’intime de mon cœur, que je pouvais répéter aussi souvent que je voulais, au fur et à mesure de ma lecture. Mêlée, hélas, à la joie évidente de cette découverte, se présentait en moi une tristesse que je ne saurais dissimuler. En effet, ce Jésus que je rencontrais à travers cette lecture de l’Évangile, il ne m’avait jamais quitté. Moi, par contre, je m’étais éloigné de lui, en cherchant ailleurs un bonheur que lui seul peut donner. J’étais l’enfant prodigue de la parabole et, là, par la rencontre de Jésus, je revenais à la maison du Père. Comme le Père organise la fête pour le retour de son fils et fait ainsi éclater la joie dans les cœurs, je ne pouvais qu’oublier ma tristesse et entrer dans la joie de cette retrouvaille avec Jésus.

Pascal

Il est évident que pour décrire ce qui s’est passé en moi lors de cette lecture « fortuite » de l’Évangile, les mots me manquent. Je me propose donc de terminer en vous présentant un écrit existant qui traduit bien ce que j’ai pu vivre. Bien sûr, je suis bien conscient que toute expérience spirituelle est unique et ne s’aurait être assimilée (ou même comparée) à une autre. Ce texte que je vais vous lire est le Mémorial de Blaise Pascal (1623-1662), texte découvert après le décès de son auteur, dans le revers de son veston .

L'an de grâce 1654, Lundi, 23 novembre, jour de saint Clément, pape et martyr, et autres au martyrologe. Veille de saint Chrysogone, martyr, et autres, Depuis environ dix heures et demie du soir jusques environ minuit et demi, FEU. « DIEU d'Abraham, DIEU d'Isaac, DIEU de Jacob » non des philosophes et des savants. Certitude. Certitude. Sentiment. Joie. Paix. DIEU de Jésus-Christ. Deum meum et Deum vestrum. « Ton DIEU sera mon Dieu. » Oubli du monde et de tout, hormis DIEU. Il ne se trouve que par les voies enseignées dans l'Évangile. Grandeur de l'âme humaine. « Père juste, le monde ne t'a point connu, mais je t'ai connu. » Joie, joie, joie, pleurs de joie. Je m'en suis séparé: Dereliquerunt me fontem aquae vivae. « Mon Dieu, me quitterez-vous ? » Que je n'en sois pas séparé éternellement. « Cette est la vie éternelle, qu'ils te connaissent seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ. » Jésus-Christ. Jésus-Christ. Je m'en suis séparé; je l'ai fui, renoncé, crucifié. Que je n'en sois jamais séparé. Il ne se conserve que par les voies enseignées dans l'Évangile: Renonciation totale et douce. Soumission totale à Jésus-Christ et à mon directeur. Éternellement en joie pour un jour d'exercice sur la terre. Non obliviscar sermones tuos. Amen.

Merci Beaucoup!

Frère Jean-François Canac-Marquis, sv

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